Herbivores contre plantes envahissantes

Herbivores contre plantes envahissantes

Crédit: Pixaobay

Les grands herbivores jouent un rôle crucial dans la préservation des écosystèmes locaux en consommant et en piétinant les espèces végétales envahissantes qui menacent la biodiversité.

Vous pourriez remettre en question cette logique, car vous pourriez vous demander si ces grands animaux consomment également et endommagent les plantes indigènes. Cependant, ce n’est pas le cas. Les plantes indigènes ont évolué pour résister à l’impact des herbivores avec lesquels elles coexistent depuis des siècles, tandis que les plantes envahissantes ne le peuvent généralement pas.

Les Grands Herbivores en tant que Gardiens contre les Plantes Envahissantes

Cette conclusion découle d’une récente étude menée par l’Université d’Aarhus et l’Institut de la faune de l’Inde, récemment publiée dans la revue scientifique Nature Ecology & Evolution. La recherche met en évidence le potentiel significatif d’utiliser de grands herbivores comme défense naturelle contre les plantes envahissantes, les empêchant de surpasser les espèces indigènes.

Les données de l’étude ont été recueillies en Inde, notamment à partir de l’enquête sur la faune la plus vaste au monde utilisant des pièges photographiques, menée tous les quatre ans, ainsi que du programme complet de surveillance des plantes de l’Inde.

Il est à noter que ces conclusions s’appliquent également aux régions dépourvues d’herbivores aussi grands que ceux que l’on trouve en Inde, comme nous le discuterons plus en détail.

La recherche se concentre sur les méga-herbivores, qui sont des animaux pesant plus d’une tonne. En Inde, cette catégorie comprend les éléphants, les rhinocéros, les buffles sauvages et le bison indien (le plus grand et le plus lourd des bovins du monde).

Un troupeau de gaurs ou de bisons indiens « pris en photo » par un piège photographique. Le gaur est la plus grande espèce de bovin vivant au monde et peut peser bien plus d’une tonne. Crédit : AITE 2018, NTCA-WII, Inde.

L’étude révèle un lien clair entre l’abondance des méga-herbivores et l’équilibre entre les espèces végétales indigènes et envahissantes : les régions avec une forte population de méga-herbivores ont tendance à avoir plus de plantes indigènes et moins d’espèces envahissantes. En revanche, les zones dominées par les espèces envahissantes ont généralement peu ou pas du tout de méga-herbivores.

Cependant, il existe des exceptions dans certaines régions indiennes où les plantes envahissantes ont poussé de manière si dense et haute que les méga-herbivores ne peuvent pas les atteindre. Cette situation est particulièrement préoccupante car les Nations Unies ont identifié les espèces envahissantes comme l’une des cinq principales menaces pour la biodiversité mondiale.

Menaces pour les écosystèmes et les économies

Les espèces envahissantes regroupent des animaux, des plantes et des champignons introduits dans des environnements où ils ne se produiraient pas naturellement, ce qui entraîne des effets néfastes sur la biodiversité indigène. Ces invasions biologiques engendrent également d’importants coûts sociétaux, avec plus de 120 milliards de dollars dépensés dans le monde au cours des cinq dernières décennies pour les combattre et les gérer, souvent avec un succès limité.

Un défi est que les méga-herbivores, en raison de leur grande taille et de leurs besoins alimentaires, consomment une grande variété d’espèces végétales, y compris celles ayant une valeur nutritionnelle moindre. Par conséquent, ils sont plus susceptibles d’incorporer des plantes inhabituelles dans leur régime alimentaire.

Bien que l’équipe de recherche aurait pu prendre en compte des espèces d’herbivores plus petites dans leur étude, ces animaux ont des rôles plus complexes dans les écosystèmes locaux et sont également des proies pour des prédateurs comme les tigres et les léopards, contrairement aux méga-herbivores tels que les éléphants.

Cheval et buffle d’eau dans le cadre d’un projet de réintroduction de la nature à Geding-Kasted Mose, près d’Aarhus, au Danemark. Crédit : Peter F. Gammelby, Université d’Aarhus

La taille n’est pas nécessairement le facteur déterminant, car nous explorons comment appliquer les conclusions de l’étude dans les régions dépourvues d’éléphants, de rhinocéros et d’autres méga-herbivores similaires.

La présence de méga-herbivores n’est pas une condition préalable pour contrôler les espèces végétales envahissantes. Des herbivores de plus petite à moyenne taille peuvent produire des résultats comparables.

Par exemple, en Hongrie, les buffles d’eau ont été montrés comme dissuasifs contre le séneçon du Cap, une espèce également problématique au Danemark. De même, des bovins des Highlands d’Écosse sont utilisés au Danemark pour gérer les églantiers, une espèce asiatique souvent considérée comme nuisible dans les écosystèmes danois, malgré leur plus petite taille par rapport aux méga-herbivores.

Flexibilité et Résilience en Conservation

elon le professeur Jens-Christian Svenning de l’Université d’Aarhus, l’auteur principal de l’étude, la taille des animaux brouteurs n’est pas le seul facteur déterminant dans la lutte contre les espèces envahissantes. Il souligne l’efficacité de l’utilisation d’un mélange d’herbivores de différentes tailles. Des espèces comme les cerfs, les buffles, les bovins et les chevaux peuvent collaborer efficacement dans les projets de renaturation en traitant différentes espèces de plantes envahissantes. Cette approche renforce la flexibilité et la résilience dans les efforts de conservation.

Ninad Avinash Mungi, chercheur postdoctoral à l’Université d’Aarhus et premier auteur de l’étude, souligne qu’un mélange d’herbivores de différentes tailles peut être utilisé. Cette approche offre de la polyvalence et de l’adaptabilité dans la lutte contre les espèces envahissantes. Il suggère également de réaliser une enquête européenne complète sur la biodiversité similaire à l’initiative détentrice du record du monde Guinness de l’Inde, compte tenu des ressources plus importantes de l’Europe pour investir dans la nature et la restauration.


Lire l’article original sur : Phys

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