Le Carburant De L’évolution : Des Scientifiques Étudient Le Maintien D’une Ancienne Inversion Chromosomique
La diversité génétique est le principal moteur de l’évolution, selon Zachariah Gompert, généticien évolutionniste de l’université d’État de l’Utah. La capacité de T. knulli à se développer sur les séquoias peut être attribuée à une inversion chromosomique, c’est-à-dire une modification structurelle qui se produit dans son génome. Cette altération de la structure du chromosome permet à T. knulli de présenter cette adaptation spécifique.
La conservation de la variation génétique et ses implications pour l’adaptation intriguent depuis longtemps les scientifiques. Zachariah Gompert, professeur associé au département de biologie et au centre d’écologie de l’université d’État de l’Utah, ainsi que des collègues de l’université de Montpellier, du centre John Innes, de l’université nationale autonome du Mexique, de Querétaro, de l’université du Nevada, de Reno et de l’université de Notre Dame, se sont penchés sur leur étude, publiée dans l’édition en ligne de Proceedings of the National Academy of Sciences, le 12 juin 2023.
Les recherches se sont concentrées sur les insectes à bâtonnets du genre Timema, qui ont un régime alimentaire très large comprenant de nombreuses espèces végétales.
M. gompert explique : “Nous avons exploré les mécanismes qui maintiennent la variation génétique au sein d’une espèce et son impact sur l’adaptation.” Il note qu’il existe plus d’une douzaine d’espèces de Timema dans l’ouest de l’Amérique du Nord, caractérisées comme des généralistes capables de consommer diverses plantes. Cependant, une espèce, Timema knulli, prospère exclusivement sur les séquoias, que les autres espèces de Timema ont du mal à utiliser.
La possibilité pour T. knulli d’exploiter les séquoias provient d’une inversion chromosomique, c’est-à-dire d’une modification structurelle de son génome. Contrairement aux mutations génétiques qui impliquent des changements dans les séquences d’ADN, une inversion chromosomique se produit lorsqu’un segment d’un chromosome se brise en deux endroits, subit une rotation de 180 degrés et est réintégré aux points de rupture d’origine.
M. Gompert précise : “Dans le cas d’une inversion, des sections substantielles du chromosome, soit 30 millions de bases d’ADN, sont inversées”.
Les chercheurs ont découvert que cette inversion chromosomique chez T. knulli est très ancienne, puisqu’on estime qu’elle s’est produite il y a environ 7,5 millions d’années. Fait remarquable, les populations contemporaines de T. knulli conservent encore les deux versions des allèles – celle qui leur permet de prospérer sur les séquoias en tant que végétaux hôtes, et la version originale qui améliore la survie sur la plante à fleurs ancestrale -, ce qui favorise la forme hétérozygote.
Selon M. Gompert, la diversité environnementale et les flux de gènes entre les populations d’insectes migrateurs contribuent à la persistance des variantes chromosomiques nouvelles et ancestrales ou du polymorphisme. Ce phénomène pourrait conférer à ces organismes un avantage dans un monde en perpétuel bouleversement en facilitant l’évolution et l’adaptation.
Les processus évolutifs complexes liés à cette inversion, plutôt que d’être préjudiciables, confèrent une résilience contre la disparition de la variation génétique et favorisent potentiellement la survie à long terme, selon M. Gompert.
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