La formation des galaxies massives dévoilée
Il est à la fois humble et inspirant de considérer combien il reste à découvrir sur l’univers. Mes collaborateurs et moi avons récemment abordé l’un des mystères de longue date de l’astrophysique : comment se forment les galaxies elliptiques massives.
Pour la première fois, nous avons désormais des preuves observationnelles solides pour répondre à cette question, comme l’explique notre étude récemment publiée dans Nature.
Deux types de galaxies
Dans l’univers actuel, les galaxies se classent en deux grandes catégories. Les galaxies spirales, comme notre Voie lactée, sont riches en gaz et forment activement des étoiles dans un disque en rotation. D’autre part, les galaxies elliptiques sont de grandes structures sphériques ressemblant à des ballons de rugby. Ces galaxies ne produisent plus de nouvelles étoiles, abritant principalement des étoiles formées il y a plus de 10 milliards d’années.
Expliquer comment les galaxies elliptiques sont passées de disques plats en rotation à leur forme tridimensionnelle actuelle a constitué un défi pour les modèles cosmologiques. Pendant la période où ces galaxies se sont formées, il y a environ 10 à 12 milliards d’années, on pensait que la formation des étoiles se produisait au sein de grands disques en rotation. Cela soulève une question essentielle : comment ces galaxies plates se sont-elles transformées en elliptiques sphériques que nous observons aujourd’hui ?
Les découvertes grâce aux observations d’ALMA
En utilisant les données de l’Atacama Large Millimeter/submillimeter Array (ALMA), nous avons identifié les lieux de naissance des galaxies elliptiques géantes. Contrairement aux attentes, nous avons découvert que les galaxies elliptiques se sont formées à travers des épisodes intenses et de courte durée de formation d’étoiles, tôt dans l’histoire de l’Univers, plutôt que de commencer comme des disques en rotation qui se sont ensuite transformés en formes elliptiques.
Notre recherche a analysé la distribution de la poussière dans plus de 100 galaxies distantes, actives lorsque l’Univers avait entre 2,2 et 5,9 milliards d’années. La poussière agit comme un indicateur du gaz — le matériau de base pour la formation d’étoiles — ce qui nous a permis d’étudier les régions de formation d’étoiles dans ces galaxies.
En utilisant une technique d’observation innovante, nous avons trouvé que la poussière dans ces galaxies était incroyablement compacte, contrairement à la structure des galaxies plates en forme de disque. La géométrie tridimensionnelle de ces régions de poussière indiquait que les premières galaxies en formation d’étoiles étaient déjà sphériques, ressemblant étroitement aux galaxies elliptiques actuelles.
Pour comprendre les processus physiques sous-jacents, nous avons utilisé des simulations cosmologiques sur ordinateur. Celles-ci ont révélé que des flux de gaz froid provenant des galaxies environnantes, combinés à des interactions et des fusions, ont entraîné le gaz et la poussière vers des noyaux denses au centre de ces premières galaxies. Ce mécanisme a alimenté une formation rapide d’étoiles et conduit aux formes compactes et sphériques observées.
Ce processus, courant dans l’Univers primitif, explique la formation rapide des galaxies elliptiques et ajoute une pièce essentielle au puzzle de l’évolution des galaxies.
Une avancée dans les techniques d’observation
Nos découvertes ont été rendues possibles grâce à une méthode novatrice d’analyse des données d’ALMA. Contrairement aux télescopes optiques traditionnels, ALMA utilise l’interférométrie, qui combine les signaux de multiples antennes pour produire des images nettes de galaxies lointaines. Cette technique avancée nous a permis de mesurer la distribution de la poussière avec une précision sans précédent, améliorant considérablement les méthodes précédentes.
Nous avons utilisé des données archivées et en libre accès d’ALMA collectées sur plusieurs années. Cela souligne la puissance des données ouvertes et de la collaboration internationale pour faire progresser la science.
Quelle est la suite ?
Les futures observations avec le télescope spatial James Webb (JWST) et le télescope spatial Euclid permettront de cartographier la distribution des étoiles dans les ancêtres lointains des galaxies elliptiques. Le télescope extrêmement grand, avec son miroir de 39 mètres, offrira des détails inégalés des noyaux formant des étoiles dans ces galaxies.
De plus, des observations plus nettes de la dynamique des gaz avec ALMA et le Très Grand Télescope fourniront des informations sur la manière dont les gaz s’écoulent vers les centres des galaxies, alimentant la formation d’étoiles et façonnant les galaxies que nous observons aujourd’hui. Ces avancées approfondiront notre compréhension des origines et de l’évolution des plus grandes galaxies de l’Univers.
Lire l’article original : Science Alert
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